Utérus bicorne : grossesse à risque possible pour le bébé et la future mère - Céline

Utérus bicorne : grossesse à risque possible pour le bébé et la future mère - Céline

Céline a une particularité, son utérus est en forme de cœur. On parle alors d’un utérus bicorne car il dispose de deux cavités distinctes au lieu d’une seule. Une malformation, plus courante qu’on ne le croit, qui rend une grossesse plus risquée pour la mère et le bébé. Et puisque peu de témoignages utérus bicorne existent, Céline a voulu transmettre son histoire pour aider celles qui seraient nées comme elle avec cette malformation utérine. Elle voulait leur donner de l'espoir. 

“Je m'appelle Céline, j'ai 30 ans.  
Je vis en Normandie entre Rouen et le Havre. Je suis infirmière coordinatrice en psychiatrie. 
Ma famille est composée de Benjamin, mon conjoint, Gaël, notre fils de 2 ans et, d'ici peu, nous accueillerons notre petite Olivia. 

Benjamin et moi, nous nous sommes rencontrés sur une application de rencontres. J'ai matché avec lui le jour de mon inscription. Nous nous sommes rencontrés 10 jours plus tard à la gare de Rouen et là, le coup de foudre, je l'ai vu et j'ai su. Ce jour-là, nous avions prévu de boire un café ensemble et de poursuivre la journée si cela se passait bien. Finalement, notre premier rencard a duré plus de 9h30 ! Impossible pour nous de nous quitter, nous avons passé la journée à nous promener au bord des quais de Seine en pleine Armada de Rouen, un rassemblement de grands voiliers. Nous avons terminé notre rencard par un verre en terrasse où un groupe de Jazz donnait un concert et c'est à cet instant précis que je suis tombée amoureuse. Nous avons échangé notre premier baiser avant de nous quitter à contre cœur. Trois mois plus tard, j'emménageais chez lui.  

D'aussi loin que je me souvienne, j'ai toujours voulu avoir des enfants. Déjà adolescente, je ressentais ce besoin viscéral en moi. Mais à l'âge de 24 ans, on m'a diagnostiqué un utérus bicorne. À cette époque, je passais une IRM abdo-pelvienne pour rechercher une possible endométriose. Alors que j'étais en train de me rhabiller, un interne est venu me voir et m'a annoncé plutôt froidement que j’avais une malformation de l'utérus importante qui m’empêcherait d’avoir des enfants sauf si je me faisais opérer. Je me souviens avoir vacillé. J'étais sous le choc. Puis quelques minutes plus tard, l’interne est revenu pour m’annoncer qu’il s’était “trompé” : je ne pouvais pas me faire opérer mais je pouvais avoir des enfants mais le parcours pour y arriver serait très, très compliqué. Les mots de l'interne résonnaient sans cesse dans ma tête. Quelques jours plus tard, j’ai reçu les résultats qui confirmaient un utérus bicorne. Je m'étais préparée au diagnostic d'une endométriose mais pas à ça. 

L'utérus bicorne est l'une des plus fréquentes malformations utérines, pourtant on en entend peu parler. Elle se traduit par un utérus en forme de cœur, comportant deux cavités séparées (utérus bicorne bicervical) ou partiellement séparées (utérus bicorne unicervical). L'utérus bicorne présente aussi une taille plus petite que la normale et engendre donc, en cas de grossesse, un risque d'hypotrophie du fœtus, de fausse couche, d'accouchement prématuré ou encore d'infertilité. Il y a plusieurs formes d'utérus bicornes et plusieurs critères de gravité. Dans mon cas, la malformation est très importante.   

Cinq mois après l'arrêt de la pilule, je suis tombée enceinte. J'ai détesté la grossesse ! Me sentir fatiguée, impuissante, faible et constamment dans l'incertitude que tout se déroule bien. Je n'ai pas pu reprendre le travail et le temps m’a semblé très long... Et puis ma grossesse a été assez médicalisée avec un suivi rigoureux deux fois par mois, à la maternité, pour vérifier le bon développement du bébé.  

 

“L'utérus bicorne est l'une des plus fréquentes malformations utérines, pourtant on en entend peu parler.”

 

Le jour du terme, on me pose le monitoring : quelques contractions mais pas de travail. Le toucher vaginal est très compliqué car ma malformation touche aussi mon col et rend cet examen très difficile. À l'échographie, on ne distingue presque plus de liquide amniotique. La sage-femme nous dit qu'elle va devoir en référer à l'obstétricien de garde. La décision est rapidement prise : il faut que notre enfant sorte vite mais un déclenchement semble peu envisageable à cause de mon utérus bicorne. Nous partons donc pour une césarienne mais je le vis bien. Je rejoins rapidement Ben et Gaël. Notre bébé est parfait. 

Au deuxième jour de vie de Gaël, le pédiatre détecte la présence d'une malformation des hanches. Un chirurgien orthopédique vient nous voir et nous explique que notre bébé devra porter un harnais de Pavlik H24 pendant environ 2 mois. La dysplasie des hanches est rapidement expliquée par ma propre malformation : Gaël s'est positionné comme il a pu dans mon utérus et ses hanches n'ont pas pu se former normalement. À ce moment, je ne peux m'empêcher de culpabiliser. À cause de moi, mon bébé a des risques de ne pas pouvoir marcher correctement, de souffrir, d'être opéré plusieurs fois. Le premier harnais a été retiré quand il a eu 3 mois et j'ai pu lui donner son premier bain. C'est comme si je découvrais mon bébé pour la première fois. J’ai pu le voir dans son entièreté, le toucher sans qu'un attirail soit positionné entre sa peau et la mienne. Après il a dû encore porter un coussin d'abduction (une autre forme de harnais) pour poursuivre le traitement et maintenir un écart entre ses cuisses mais, cette fois, nous pouvions le changer, l'habiller et le baigner. Ces gestes anodins du quotidien nous étaient enfin accessibles. Au total, le traitement par harnais et coussin d'abduction aura duré près de 6 mois, en parallèle des séances de kinésithérapie et d'ostéopathie. Aujourd'hui lorsque je vois Gaël marcher, courir et sauter, j'oublie presque ce par quoi nous sommes passés. Je suis fière de lui, fière de nous. 

Je reviens à mon séjour à la maternité durant lequel l'obstétricien qui m'a opérée m'a expliqué que la corne droite de mon utérus était, selon lui, complètement bouchée et que si je voulais vivre une seconde grossesse, il faudrait qu’elle se loge forcément dans la corne gauche. 

Quand je tombe enceinte à nouveau et que l'échographie de datation révèle que la grossesse se situe dans la corne droite, c'est la panique à bord ! Je passe alors une très longue échographie avec la gynécologue référente qui nous annonce qu'elle ne trouve aucune communication entre le col et la cavité droite de mon utérus bicorne. Nous devons alors nous préparer à une IMG* suivie d'une ligature de la trompe droite pour éviter toute grossesse de ce côté, à l'avenir. Il y a un trop grand risque d'hypotrophie du fœtus mais surtout un risque de rupture utérine. Il faut agir vite. Elle tente de nous rassurer et nous explique que mon cas sera discuté dès le lendemain matin pour s'accorder sur la suite des événements. Nous sommes totalement effondrés. Nous avons entendu son cœur battre mais nous allons devoir l'arrêter.

Le lendemain, je suis appelée pour passer une IRM en urgence. Je pense alors que cette imagerie servira pour l'opération mais en fait elle permet de révéler une communication entre la corne droite et le col qui ne pouvait pas être détectée à l'échographie. Ascenseur émotionnel, soulagement : la grossesse est finalement possible ! Comme pour Gaël, nous sommes suivis deux fois par mois et dans quelques semaines, nous allons accueillir notre fille ! 

 

 

Quand je repense à ce que m'ont dit les différents professionnels rencontrés lors de mon parcours gynécologique, je me dis que mes grossesses sont un miracle et que mes enfants sont tous les deux des battants, mes petits warriors ! Ils ont réussi à se développer là où on m'avait dit que ce ne serait pas possible.  

Ma malformation est encore minimisée par certains qui ne voient pas forcément où se situent les difficultés dans mon chemin vers la maternité, notamment parce que je suis tombée enceinte rapidement et que je n'ai pas eu à passer par un parcours de PMA. Mais l'annonce d'une potentielle IMG, il y a quelques mois, a été assez traumatique pour moi. Les mots prononcés par les différents professionnels de santé resteront gravés à tout jamais dans ma mémoire.  

Aujourd'hui, je me sens reconnaissante. Reconnaissante envers mon entourage proche qui s'est montré compréhensif et soutenant lors des moments difficiles. Reconnaissante envers mon corps qui a réussi à concevoir un bébé à deux reprises malgré ma malformation utérine. Reconnaissante envers la vie d'avoir mis Benjamin sur mon chemin. Il est mon pilier, ma force, ma lumière dans les moments sombres et surtout un père extraordinaire. 

Je déplore le manque d'informations et de communication autour de l'utérus bicorne. Je n'ai trouvé que peu d'articles à ce sujet et encore moins de témoignages de femmes ayant vécu des situations similaires. Je me suis très souvent sentie seule, perdue et incomprise. C'est pour cela que j'ai voulu témoigner. Pour que les autres femmes présentant cette malformation sachent qu'elles ne sont pas seules. Que c'est tout à fait normal d'avoir peur car ce n'est pas anodin. À travers mon récit, j'aimerais apporter de l'espoir. Tout peut très bien se passer avec un bon suivi."  

 

Le tips de Céline  
S'entourer de professionnels de santé qui communiquent des informations claires et se montrent à l'écoute. 

La pensée freestyle de Céline 
"La maternité est une folle aventure remplie de joies mais aussi de peines et de doutes. Elle peut révéler en nous une force incroyable et insoupçonnée qui nous permet de nous battre pour nos enfants. Être mère m'a fait découvrir l'amour inconditionnel et il me tarde de le devenir pour la deuxième fois."

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* IMG : interruption médicale de grossesse. 

Si le témoignage utérus bicorne de Céline t’a éclairée ou aidée et que tu aimerais toi aussi nous transmettre ton histoire pour partager à ton tour ton expérience et ton savoir, écris-nous ! 

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